ECHO DE SAINT-PIERRE N° 99 - Mars 1998
UN RECTEUR OBSTINE A SAINT-PIERRE
A LA FIN DU XVIIème Siècle
Au cours des siècles derniers, des épidémies sévissaient régulièrement sur les vaisseau de la marine royale, faute dhygiène, deau potable et de denrées fraîches. Brest, port militaire, nétait pas épargné par le fléau, qui simposa durant les années de 1689 à 1691, puis en 1741 et 1746, et surtout durant les années sombres de 1757 et 1758, qui enregistrèrent des milliers de victimes et marquèrent durablement les consciences.
Le typhus et le scorbut étaient alors les maladies les plus répandues et redoutées, car en se propageant parmi la population quelles décimaient, elles entretenaient une psychose collective, de sinistre mémoire, qui grandissait dans toute la région.
En 1691, en pleine guerre contre la coalition anglo/hollandaise, lépidémie culmina, au point que lintentant de la marine, M. DESCLOUZEAUX, se résolut à réquisitionner le presbytère de St-Pierre-Quilbignon, afin dy loger des malades.
Ce sieur Hubert de CHAMPY, Seigneur DESCLOUZEAUX, avait grand pouvoir. Il dépendant directement du Ministre de la Marine, et avait pour charge les affaires de justice, de police et de finances.
En ce temps-là, le logement des malades était problématique, dautant quil fallait, bien souvent, improviser des ambulances de fortune, et que les places disponibles sur Brest et Recouvrance étaient notoirement insuffisantes.
De plus, la capacité limitée du modeste hôpital maritime, fit prendre conscience aux autorités, de la nécessité dune modernisation. Lincendie de 1776 consuma presque entièrement le vieil hôpital, et ce nest que quelques décennies plus tard, en 1822, que M. DE CLERMONT TONNERRE, Ministre de la Marine, posa la 1ère pierre dun nouvel hôpital, plus fonctionnel.
Face à la réquisition de son presbytère, le recteur de St-Pierre, lAbbé MADEC, se montra fort réticent, prétextant quil y avait dautres maisons susceptibles daccueillir les malades, et que la question du dédommagement navait pas été tranchée. Lévêque du Léon, Mgr LENEBOUX DE LA BROSSE, intervint dans le différend, demandant à son recteur la soumission aux ordres qui navaient, selon lui, quun caractère exceptionnel et provisoire. Mais, le recteur ne céda pas, rétorquant de la difficulté quil aurait, en séloignant de ses ouailles, à remplir son apostolat. Dautant que lannée précédente, la maladie contagieuse lavait déjà contraint à quitter Recouvrance, qui resta jusquen 1750 une dépendance de la paroisse de St-Pierre. Cest à lachèvement de léglise de St-Sauveur que, par décret en date du 16 mai 1750, Mgr GOUYON DE VAUDURANT, donnera à Recouvrance, sa qualité de cure et de paroisse séparée, indépendante de St-Pierre-Quilbignon.
M. DESCLOUZEAUX, fort des consignes reçues, enjoignit au prévôt de la marine dexécuter les ordres. Ce qui fut fait. Cest en présence du dit prévôt, de ses archers, du notaires POLARD, dun marguillier de la paroisse, et dun maréchal ferrant, à défaut de serrurier, que la porte du presbytère fut forcée.
Le notaire procéda à linventaire des lieux, et les autorités, à sa possession. Quant au recteur, mis devant le fait accompli, il prit acte avec philosophie, et se soumit avec sagesse.
M. BARON
Sources : Prosper Levot - Archives Départementales.