ECHO DE SAINT-PIERRE N° 43 - Mai 1992

DES DROITS ET DES DEVOIRS.

Brest n’a existé, à ses débuts, que comme base militaire. Ses limites étaient le château. Cité Gallo-romaine, place forte médiévale que se disputaient Bretons et Anglais, c’était un lieu stratégique important. Richelieu, Colbert, Vauban entreprirent des travaux, qui, poursuivis, allaient modeler définitivement le caractère militaire de cette ville.

Localité voisine, Saint-Pierre Quilbignon eut son sort lié au développement de Brest. Le développement de l’arsenal, du port militaire, amenèrent la confiscation des berges de la Penfeld et du bord de mer jusqu’aux Quatre-Pompes. La défense du site amena la création des forts du Questel, de Kéranroux, de Montbarey, du Portzic, la mise en place des batteries du Stiff, de Sept, de Kérangoff. Captage des eaux pour alimenter les bateaux à l’aiguade des Quatre-Pompes. Les cuves à mazout, les lieux d’entraînement et de formation : Polygone, champ de tir, Ecole Navale, caserne de Mesdoun,... sans compter les terrains réservés !

On peut constater que la quasi totalité des ateliers de l’arsenal et des services de la Marine se trouvent sur la rive droite. Inévitablement, le développement de Saint-Pierre fut lié à cette extension. Un bourg insignifiant encore en 1750, mais déjà de nombreux villages : Prat Lédan, Laninnon, Ruisan, et 2000 habitants, puis un développement rapide de sa population à partir de 1850, celle-ci composée pour beaucoup de militaires et d’employés de l’arsenal.

La proximité du lieu de travail, les espaces offerts par rapport à la surpopulation de Recouvrance étaient facteurs de développement. Aujourd’hui, les marges de circulation, l’implantation de la Thomson-CSF, d’Ifremer, la Technopole, ont amené un brassage de la population.

Beaucoup d’employés de l’arsenal habitent à l’extérieur de Brest. Mais leur présence reste forte sur Saint-Pierre, et ce n’est pas les agences bancaires qui nous contrediront. Leurs caisses sont largement approvisionnées au moment de leurs virements de salaires et de retraites.

Mais cela n’a pas toujours été le cas. Ils reviennent de loin les salariés de l’arsenal !
Enrôlés de force, parfois militarisés, mal payés ou pas payés, subissant une discipline de fer, ce fut souvent la misère. De ces épreuves naquit une tradition ouvrière forte, identique à celle de certains bastions industriels. Une carrière à l’arsenal, c’est aussi le syndicalisme, les grèves et souvent une forte solidarité entre les salariés.

Les incertitudes d’aujourd’hui, quant à l’avenir, rendent amer, car si la région brestoise a reçu, elle a aussi beaucoup donné. La présence militaire, l'arsenal, ont profondément marqué l’urbanisme de la ville. L’Etat, les autorités militaires n’ont pas toujours été favorables à d’autres implantations industrielles.

Le lien qui unit la région brestoise à l’Etat est très ancien, et ce court article ne fait que l’effleurer. Souhaitons que les décideurs d’aujourd’hui en prennent conscience.

J.P. MADEC.