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ECHO DE SAINT-PIERRE N° 223, mai 2010

Le métier d'observateur à bord des ballons captifs
 
La saucisse Caquot

Un observateur qui monte à son échelle de corde, qui fait la liaison entre le bateau et le caquot

Observateurs en tenue

Observateur dans sa nacelle
    
De 1917 à 1940 , un centre de ballons captifs existait à la Grande Rivière. (voir Echo d'avril 2010 ) Mais, quel était le travail d'un observateur ? Le métier était-il difficile ?

D'abord, il fallait se former...
    La formation durait 3 mois à l'école des arrimeurs et observateurs qui se trouvait aussi à la Grande-Rivière. Puis elle était suivie d'un perfectionnement sur ballon libre à Rochefort. On y apprenait à utiliser les instruments de précision comme l'altimètre, l'anénomètre, le téléphone, les  jumelles... et à cultiver son sens de l'orientation et d'appréciation des distances. Tout ce qui touchait la manoeuvre de l'aérostat, en mer et à terre, ainsi que son entretien devait être connu. La physique des gaz, la météorologie, l'aérodynamique et la photographie complétaient cette formation.

Quelles étaient les conditions de travail ?
    Elles étaient difficiles. D'abord il fallait vaincre le froid. Pour cela, les aérostiers avaient la même tenue que les pilotes d'hydravions : une veste de cuir, un pantalon de cuir doublé en molleton, une paire de gants en cuir, des bottes, des lunettes, des chaussons fourrés et un bonnet de vol. L'ennui, c'est qu'avec cette grosse tenue ils devaient affronter une deuxième difficulté qui était celle de monter à la nacelle par une simple échelle de corde. Cette escalade ressemblait à de l'acrobatie en raison des mouvements non conjugués et désordonnés du bateau soumis à la houle et de la saucisse ballotée par le vent. Le calvaire des malheureux observateurs ne faisait d'ailleurs que commencer. Car une fois le ballon haussé en altitude, il subissait en effet des remous et des balancements invraisemblables dont l'amplitude et la cadence dépendaient de l'état de la mer et de la force du vent. Au milieu de ces soubresauts, il devait s'efforcer de scruter point par point la surface de la mer dont l'horizontalité lui paraissait échapper à toute géométrie, pour y déceler quelque manifestation menaçante. A vrai dire, la menace montait plutôt de son estomac et la plupart du temps, faute d'un entrainement approprié, le pauvre observateur, agrippé à sa nacelle, engoncé dans ses vêtements, ses yeux valsant dans ses orbites au rythme des balancements, au bord de la nausée, était bien incapable de fixer le moindre point sur la mer, et par conséquent de déclencher la moindre alerte !

Y-avait-il des accidents du travail ?
Oui, de nombreux. En effet , le ballon, le Caquot, se comportait assez bien lorsque le vent soufflait de manière régulière, mais le danger apparaissait lorsque les rafales donnaient de l'amplitude au tangage. Par exemple, le 14 août 1917, à l'entrée du goulet de Brest, le ballon remorqué par le chalutier «Ville-de-Gujan-Mestras» fut soudain pris dans des turbulences aériennes. L'empennage de l'aérostat toucha l'eau et se déchira sous le choc. Dégonflé, le ballon perdit sa stabilité et se retourna. Les deux observateurs qui se trouvaient dans la nacelle furent jetés à l'eau et l'un deux fut étranglé par les cordes de manoeuvre. Le 10 octobre 1917, c'est la foudre qui heurta une enveloppe et l'incendia.Les deux hommes furent précipités hors de la nacelle et l'un d'eux décéda quelques heures plus tard. Le 20 septembre 1917, c'est le câble du ballon de la vigie d'Ouessant qui casse brutalement dans une rafale plus forte que les autres. L'observateur du son fut sauvé grâce à son parachute, l'aérostat fut retrouvé à Perros Guirrec !

Le 11 novembre 1918, en Bretagne, il y avait 239 observateurs de ballons captifs.

Merci à Thierry Le Roy pour sa collaboration. Ces informations sont issues de son livre  «La guerre sous-marine en Bretagne. 1914-1918». édité en 1990 - ISBN 2-9505074-0-9
Nathalie Guilard

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