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ECHO
DE SAINT-PIERRE N° 216, octobre 2009
KER AR ROZ Village du Tertre ( ou de la colline )
Le doué ou douet, en pays Gallo, était la buanderie où l'on
blanchissait le fil ou la toile de lin. Peu à peu il a été assimilé au
lavoir.
Observez cette photo du doué de
Kérarros... La tenue et la coiffure de la dame se situant debout en bas
des marches, nous situe la prise de vue vers les années 1900-1910.
Voyez les amas de linge posé sur les murets ! A gauche, on devine même
un second lavoir ... De Kerarros à Kerastel, il y avait 12 lavoirs (11
appartenaient à des particuliers, celui de Kerarros était municipal).
De nos jours, le lavoir de Kerraros existe toujours : il se situe au
carrefour de la rue Madame et de la rue de Kerraros. Il a, depuis, un
toit et je crois qu'il est toujours en activité.
Certaines blanchisseuses de métier lavaient pour les gens de leur
quartier, d'autres avaient une clientèle de Brest intra muros :
bourgeois, commerçants, militaires, et aussi pour la clinique du
docteur Pouliquen.
Dans les années 1935-40,
chaque lundi, le père Traon, son cheval de labour attelé à un tombereau
débordant de ballots de linge, se dirigeait vers le centre de Brest. Il
était accompagné d'une lavandière qui connaissait l'adresse des
clientes de ses consœurs. Celles-ci se rendaient, en parallèle, à
Brest, mais en tramway. Chacune livrait ses clientes et percevait ses
gages. Le lavage était payé à la pièce suivant un barème. Au retour, le
tombereau était chargé de nouveau avec du linge à laver.
Ces lavandières ne pouvant pas toujours assumer une telle quantité de
linge, embauchaient d'autres personnes payées à la journée.
Le lavoir étant municipal, la mairie désignait une personne volontaire
pour l'entretien et répartir les jours réservés aux particuliers et aux
professionnelles. Elle n'était pas rémunérée mais percevait un
écot de chaque utilisatrice du lavoir, suivant le temps d'occupation
des lieux, montant fixé par la mairie. Le samedi, en fin d'après-midi,
le lavoir était vidé, frotté au balai-brosse et rincé.
Le lundi était réservé aux particuliers : chaque mère de famille lavant
son linge. Il est à noter que les draps étaient souvent confiés aux
lavandières de métier !
Le mardi, dès 5 heures,
en été, l'aubade des battoirs (baptisés badouets) commençait. Le savon,
les brosses et les langues allaient de l'avant ainsi pendant deux jours.
Puis venait le jour de la lessive dans la maison de buée ( buanderie )
: le linge, mis dans des cuviers en bois, est revêtu d'un drap
contenant de la cendre de bois sur laquelle est versée l'eau bouillante
qui produit ainsi la soude. Cette lessive est récupérée dans un
receptacle à la base, puis reversée sur le linge. Après quelques
heures, de l'eau bouillante est versée sur le linge pour enlever le
plus gros de la lessive. Il sera ensuite rincé au lavoir puis essoré en
le tordant, avant de le mettre à sécher.
La vulgarisation des lessiveuses et de l'eau de javel supprimera cette méthode et les buanderies.
Et la cuisine alors ...
Ne pouvant être au lavoir et à la cuisine en même temps, la méthode la
plus simple était d'envoyer la case (le riz au lait, le far, ou le rôti
de porc avec les pommes de terre) à cuire au four du boulanger. Une
voisine avait une autre méthode pour cuire son ragoût : elle le portait
à ébullition puis elle entourait la cocotte d'un vieux lainage et
l'introduisait sous l'édredon. Comme les literies étaient composées de
couettes et édredons en plumes, c'était un bon isolant, et le
ragoût continuait à mijoter pour être prêt vers midi ! (c'est le
principe de la marmite norvégienne qui sera appliqué pendant la guerre,
mais avec d'autres isolants)
Yves Le Roy
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