La batterie extérieure du Portzic
La deuxième moitié du XIXe
siècle a vu l'explosion des techniques industrielles. Les
conséquences militaires avaient déjà
été mises en évidence pendant la guerre de
Crimée (1854-56) et la guerre de Sécession
américaine (1861-65) : chemin de fer, machines à vapeur,
navires en fer, puis cuirassés, canons rayés se chargeant
par la culasse.
Le manque de
préparation des armées françaises et en
particulier leur retard technologique en armement, a été
une des raisons, avec un commandement inadapté, de la
défaite française de 1870. Après le paiement d'une
rançon énorme (5 milliards de francs-or) à
l'Allemagne, la France a essayé de rattraper son retard en
lançant un programme considérable de réarmement.
Il concernait la frontière de l'Est du fait de la perte de
l'Alsace-Lorraine, mais aussi les ports militaires du fait de
rivalités récurrentes avec la Grande-Bretagne.
A partir de 1874, on construit des batteries tout autour de la rade de
Brest, qui compteront encore plus de 300 canons en 1900. La partie la
mieux défendue est bien sûr le Goulet, armé par 50
(il en était prévu 70) canons de 32 cm (obus de 400 kg),
mais aussi des canons de 24 cm, de 100 mm, des mortiers. L'un des
points forts était la Pointe du Portzic.
Pour rendre la situation intenable à une escadre qui aurait
réussi à franchir le Goulet, des batteries couvraient la
Rade (Maison Blanche, Brest, Plougastel, Lanvéoc, Ile Longue,
Roscanvel). L'une des plus importantes était installée
à Maison Blanche, abritée derrière le fort du
Portzic, en 1877-78.
Elle comprenait, d'Est
en Ouest, des emplacements pour 2 canons de 32 cm et 4 canons de 24 cm,
séparés par des magasins à munitions qui
abritaient les obus dans des salles voûtées construites
dans les traverses, ces buttes de terre qui séparaient les
canons de façon à éviter les coups d'enfilade.
Les gargousses de poudre noire étaient conservées
à l'écart dans un magasin souterrain, très bien
conçu pour conserver une température et une
humidité constantes. La salle voûtée était
construite sur un vide sanitaire ventilé. Elle était
entourée d'une gaine ventilée, couloir étroit qui
l'isolait de la masse de terre. L'éclairage se faisait par des
lampes à pétrole, isolées derrière un verre
épais et inaccessibles de l'intérieur de la soute. Enfin,
en partie supérieure, des évents étaient
disposés pour diminuer les effets d'une explosion du local.
En 1888, on envisagea d’y installer une batterie de 6 canons de
100 mm, ou, à défaut, 6 canons 90 mm Modèle Marine
1881, mais l'absence de crédits a eu raison de cette intention,
et les vieux canons de 1877 restèrent en place.
En 1914, contrairement à la plupart des batteries de Brest, les
canons furent jugés trop vieux pour être envoyés au
front. On peut encore les deviner sur les photos aériennes de
1919 du site de la Mairie de Brest
(www.mairie-brest.fr/archives/photos-aeriennes-anciennes.htm).
Depuis cette époque, la végétation a eu raison du travail des hommes.
Yves Hubert